Un jour, ils sont partis de l’endroit où ils vivaient. Certains à quelques centaines de kilomètres et d’autres à plusieurs milliers. Certains seuls et d’autres avec leur famille. Les raisons ? Elles peuvent être multiples. L’idée que l’herbe est plus verte ailleurs, le désir d’aventures, une passion, un besoin professionnel, l’exode… Un ChallengeAZ qui prend des airs de globe-trotter avec 26 individus qui ont eu la bougeotte à un moment de leur vie!
Sébastienne Guillemette Brien (1808-1891), sosa 77, de Questembert à Saintes
Malgré un combat engagé il y a ben longtemps, ,on est encore loin aujourd’hui d’avoir supprimé toutes les inégalités entre les hommes et les femmes dans la société. Alors que dire de la place de ces dernières au 19e siècle quand selon l’article 213 du code civil, la femme devait obéissance à son mari. Je ne peux vous dire quelles étaient les relations entre Sébastienne Guillemette Brien et son mari, mais c’est une ancêtre qui suscite toute mon admiration, mais aussi toute ma curiosité car à un moment de sa vie elle a été au-delà des conventions de son époque.
Sébastienne Guillemette Brien est née le 3 juin 1808 à Questembert, commune située à une trentaine de kilomètres au nord de Vannes. Elle est la fille de Pierre, cloutier et de Perrine Jehanno. Sébastienne Guillemette est la 8e enfant du couple, mais 5 des ses frères et sœurs sont morts en bas âge. Elle aura par la suite 2 autres frères en 1810 et 1812.
Le 29 septembre 1821, le père de Sébastienne décède. 6 ans plus tard, c’est au tour de sa mère, le 7 mai 1827. Le mariage était-il prévu avant le décès de sa mère, ou est-ce dernier qui précipite Sébastienne à la mairie pour s’unir avec Joseph Thomas Mercier? Impossible à dire, mais Sébastienne est mineure et orpheline, c’est donc la délibération de son conseil de famille reçue par le juge de paix du canton de Questembert le 16 juillet 1827 qui l’autorise à se marier. Le mariage avec Joseph Thomas Mercier, âgé de 22 ans et natif de Questembert, est célébré le 8 août 1827 dans la dite ville. De cette union, vont naître 9 enfants, dont 2 décèderont dans leur jeunesse.
Au début des années 1830, le couple s’installe à Rochefort-sur-Terre, à quelques kilomètres de Questembert. Il y a quelques changements dans la famille : le mari de Sébastienne est entré dans «la fonction publique». Il est courrier piéton ou facteur rural. Le métier est tout récent, il a été instauré par l’administration des postes le 1ier avril 1830. Son but est d’une part, de réduire le nombre de courriers non réclamés, car les habitants des campagnes devaient se rendre dans la ville la plus proche pour retirer leurs lettres mais d’autre part, de rompre l’isolement des ruraux. Joseph Marie Thomas Mercier fait donc partie des 5000 facteurs ruraux qui ont été recrutés pour distribuer le courrier. Il effectue sa distribution tous les deux jours, puis quotidiennement à partir de 1832. Pierre Marie, son fils aîné, le rejoint à la fin des années 1840.
Le 27 février 1852, la situation change pour la famille de Sébastienne : Joseph Marie Thomas décède. Sur les 6 enfants présents au domicile familial, 4 sont âgés de moins de 12 ans. A ce moment, pour faire vivre sa famille, Sébastienne a pris la succession de son mari. Elle a probablement brisé les conventions établies en faisant un métier qui devait être majoritairement masculin à l’époque. Sébastienne a donc arpenté les routes de campagne, quelque soit la météo (il ne faut pas oublier que nous sommes en Bretagne ☺), pour distribuer le courrier tous les jours de la semaine. Il faut savoir que le salaire d’un facteur rural et d’autant plus d’une factrice, dépendait de la distance parcourue pendant ses tournées. En clair, cela signifiait qu’il fallait beaucoup marcher pour essayer de gagner sa vie au mieux. Toutefois, le salaire fixe a progressivement remplacé le salaire kilométrique à partir des années 1860.
On peut se demander combien de kilomètres a parcouru Sébastienne pendant toute la durée de son service pour l’administration postale. Ce qui est sûr en revanche, c’est qu’elle y a travaillé 20 ans, 5 mois et 22 jours et cela lui permet de toucher une pension de 168 fr à partir du 1ier janvier 1873.
Mais, c’est encore là que Sébastienne nous surprend. A plus de 64 ans, et après avoir habité pendant près de 40 années à Rochefort-en-Terre, elle quitte la rue Notre-Dame de Tronchaye. Pourquoi? Bonne question, à laquelle je n’ai pas de réponse. On la retrouve au Gué d’Alléré, commune située à une trentaine de kilomètre de La Rochelle en1874, puis à Berneuil, au sud de Saintes en 1877. Visiblement, elle finit de se fixer à Saintes, où elle s’éteint le 23 juin 1891. Il n’y a pas de recensement pour les 3 communes aux dates où elle y a habité, et les tables de successions et absences ne sont pas en ligne, ce qui fait que je n’en sais pas davantage pour l’instant.
Pendant mes années d’études, j’ai travaillé pendant de nombreux étés, aux PTT, comme on disait, à trier le courrier en salle, gares du Nord et de l’Est, mais aussi dans les trains partant de la Chapelle vers Metz, Nancy ou Strasbourg. Si j’avais su à l’époque que deux de mes ancêtres avaient distribué le courrier dans la campagne morbihannaise, j’aurais sûrement eu une pensée pour eux.
Sources & crédits
Gallica – En l’an 2000 : Le facteur rural
Archives départementales du Morbihan
Musée de la Poste – Voilà le facteur
Le Mars des Terres Rouges – La tournée du facteur rural
Gallica – Bulletin des lois de la République française 1873 N° 561
Archives départementales de la Charente-Maritime
Avoir une factrice parmi ses ancêtres, voilà qui est original. A-t-elle pu suivre un de ses enfants lors de son déménagement ?
Les enfants que j’ai pu suivre étaient en région nantaise. L’envie de bouger peut-être tout simplement 🤔
Je n’aurais pas pensé qu’une femme puisse être factrice à cette époque-là. Belle découverte !
Moi non plus, c’est plus courant maintenant, sauf qu’elles ne sont plus à pied, ni même à vélo des fois 😅